(Ottawa, Ontario – le 2 mai 2019) – Le Centre canadien pour l’éthique dans le sport (CCES), l’Association canadienne pour l’avancement des femmes, du sport et de l’activité physique (ACAFS) et AthlètesCAN expriment leur désaccord à l’égard du Règlement régissant la qualification dans la catégorie féminine de l’Association internationale des fédérations d’athlétisme (IAAF) concernant les athlètes présentant des différences du développement sexuel. Le CCES, l’ACAFS et AthlètesCAN accordent une grande importance à l’inclusion et au respect dans le sport, et continuent de croire que le Règlement s’oppose à ces principes.
Hier, le Tribunal arbitral du sport (TAS) a rendu sa décision dans l’appel de Caster Semenya et d’Athletics South Africa (ASA) concernant le Règlement de l’IAAF, qui impose plusieurs exigences aux athlètes féminines qui présentent une différence du développement sexuel résultant d’un taux élevé de testostérone circulante (supérieur à 5 nmol/L dans le sérum) et qui sont sensibles aux androgènes. L’obligation la plus préjudiciable est sans doute celle d’abaisser artificiellement la testostérone naturelle d’une athlète pendant une période prolongée sous le seuil de 5 nmol/L pour qu’elle soit admissible à certaines courses et compétitions, connu sous le nom « épreuves visées ».
« Le sport ne bénéficie nullement de l’exclusion de personnes, surtout celles qui sont marginalisées, affirme Allison Sandmeyer-Graves, chef de la direction de l’ACAFS. La volonté de l’IAAF de préserver l’équité des compétitions est compréhensible, mais son obstination à établir une "norme de féminité" est profondément offensante et déplacée. Elle est incompatible avec nos valeurs fondamentales que sont l’inclusion et le droit de toutes les femmes de participer pleinement au sport sans subir de discrimination. »
« Y at-il des contrôles ou des limites sur les athlètes masculins dont les différences génétiques pourraient leur conférer un avantage? Non, en fait, ces athlètes sont généralement célébrés. Les femmes, au contraire, continuent d’être soumises à des examens et à des politiques arbitraires, démesurées et invasives, déplore Paul Melia, président-directeur général du CCES. La communauté sportive a le devoir de promouvoir et de protéger l’inclusion et l’égalité des sexes dans le sport à tous les niveaux. »
« Le Règlement de l’IAAF risque fort de causer un tort important à des athlètes du monde entier, y compris à de nombreuses athlètes canadiennes. Qui plus est, il est fondé sur une idéologie du genre dépassée, qui entend dicter l’apparence et le comportement des femmes. Cette façon de penser isole les individus et mine l’intégrité et le potentiel du sport », affirme Dasha Peregoudova, présidente d’AthlètesCAN.
Informations supplémentaires sur la décision
Par une majorité de deux contre un, la formation arbitrale du TAS a rejeté les demandes d’arbitrage de Caster Semenya et d’ASA. La formation arbitrale a conclu à l'unanimité que le Règlement de l’IAAF sur les différences du développement sexuel est discriminatoire, mais la majorité considère, compte tenu des preuves présentées par les parties, que cette discrimination est une mesure nécessaire, raisonnable et proportionnée pour atteindre l’objectif de l’IAAF, soit assurer l’intégrité du sport féminin durant les épreuves visées. Toutefois, dans sa sentence arbitrale de 165 pages, la formation arbitrale du TAS a exprimé une vive inquiétude au sujet de l’application pratique du Règlement à des cas futurs. Bien que la majorité ait conclu que les preuves présentées jusqu’à maintenant n’infirment pas la conclusion de proportionnalité à première vue, la formation arbitrale a souligné que cela pourrait ne pas toujours être le cas, et qu’il faudra porter une attention particulière à l’application équitable du Règlement.
Le CCES, l’ACAFS et AthlètesCAN reconnaissent également que cette décision aura des répercussions pour toutes les athlètes qui prennent part aux « épreuves visées » de l’IAAF, lesquelles sont assujetties au Règlement. La mise en œuvre de ces règlements nécessitera un suivi effractif continu des concurrentes ciblées afin de déterminer si leur taux de testostérone naturelle est inférieur au taux prescrit. C’est pour cette raison que le TAS s’est dit préoccupé par l’application équitable du Règlement, une inquiétude partagée par le CCES, l’ACAFS et AthlètesCAN. À tout le moins, l’IAAF devrait s’assurer que toute athlète ciblée par ces politiques puisse être représentée gratuitement par un avocat indépendant de son choix.
Le CCES, l’ACAFS et AthlètesCAN estiment que la politique de l’IAAF soulève une question fondamentale relevant des droits de la personne : une athlète présentant un taux élevé de testostérone naturelle devrait-elle être obligée de subir un traitement médical important (un traitement continu de suppression des hormones), alors que les athlètes masculins dont le taux de testostérone naturelle varie grandement et les athlètes présentant diverses différences sur le plan génétique et physique ne sont pas tenus de le faire? On peut se demander si par cette décision, la communauté sportive internationale tente une fois de plus de régir le genre des femmes. Une telle pratique irait à l’encontre des droits de la personne, notamment de divers engagements pris par les Nations Unies et du Comité international olympique (CIO) pour que chaque individu ait la possibilité de faire du sport sans discrimination d’aucune sorte.
Le TAS a publié un résumé de sa décision (en anglais seulement). Le CCES, l’ACAFS et AthlètesCAN souhaitent que le TAS publie également la sentence arbitrale de 165 pages (caviardée pour protéger la confidentialité des renseignements médicaux des personnes visées) pour permettre une analyse complète des preuves présentées et des motifs de la décision. Le CCES, l’ACAFS et AthlètesCAN surveilleront les répercussions de la décision et sa mise en application.
De plus amples renseignements sur le Règlement régissant la qualification dans la catégorie féminine sont disponibles sur le site Web de l’IAAF (Règlement disponible pour télécharger en français).
À propos du CCES
Le CCES est l’organisme national indépendant et à but non lucratif responsable de l’administration du Programme canadien antidopage. Nous reconnaissons que le sport sain peut faire une grande différence pour les individus, les collectivités et notre pays. Le CCES reconnaît la contribution financière du gouvernement du Canada. Nous avons pris l’engagement de travailler de façon collaborative pour engendrer un système sportif basé sur des valeurs et animé par des principes; de protéger l’intégrité du sport des forces négatives du dopage et d’autres menaces non éthiques; de défendre le sport juste, sécuritaire et ouvert à tous.
À propos de l’ACAFS
L’ACAFS travaille à créer un milieu du sport et de l’activité physique équitable et inclusif au Canada qui favorise l’autonomisation des filles et des femmes, en tant que participantes et leaders actives, dans le sport et par le sport. En concentrant ses efforts sur les changements systémiques, l’ACAFS collabore avec des gouvernements, des organisations et des leaders pour remettre en question le statu quo et promouvoir des solutions qui produisent des changements mesurables.
À propos d’AthlètesCAN
AthlètesCAN est l’association des athlètes des équipes nationales canadiennes. Il s’agit de l’unique regroupement d’athlètes au pays qui soit totalement indépendant et inclusif, et du premier organisme en son genre dans le monde entier. À titre de voix des athlètes de l’équipe canadienne, AthlètesCAN veille à ce que le système sportif soit centré sur les athlètes en formant des athlètes leaders qui influenceront les politiques du sport et qui, en tant que modèles à émuler, favoriseront une solide culture sportive.
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Directrice générale
AthlètesCAN
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